Eco-construction : maison passive ou bioclimatique ?

Difficile, quand on s’intéresse un minimum à la construction et à l’écologie de passer à côté de ces 2 concepts référents : le bioclimatisme et la maison passive. Ils ont tous deux pour objectif de rendre une maison moins énergivore. Mais quel concept est au final le plus écologique ? Éléments de réponse dans cet article…  

Si vous avez un projet de construction, vous avez certainement entendu parlé de ces solutions constructives, ou méthodes architecturales : la maison bioclimatique et la maison Passivhaus. Nous allons vous en résumer leurs origines, leurs principaux aspects et tenter de comparer leur impact écologique, pour vous donner les clés d’un projet réussi selon vos envies.

La maison bioclimatique ou le bioclimatisme

Le bioclimatisme, c’est l’art de construire en harmonie avec le climat. Cette approche architecturale n’est pas nouvelle. En réalité, elle est aussi ancienne que l’architecture elle-même ! Les hommes ont toujours cherché à s’adapter à leur environnement pour se protéger des éléments et optimiser leur confort.

L’origine du bioclimatisme : une histoire de symbiose avec l’environnement

Des racines historiques

Les premières habitations troglodytes

Les hommes préhistoriques ont creusé des abris dans la roche pour se protéger du froid et des intempéries. C’est une des premières formes d’architecture bioclimatique, exploitant la masse thermique de la terre pour réguler la température intérieure.

Les maisons traditionnelles

Dans toutes les cultures, les habitations traditionnelles ont été conçues pour répondre aux spécificités climatiques locales. Les toits en pente pour évacuer la neige, les murs épais pour conserver la chaleur en hiver, les cours intérieures pour rafraîchir les pièces en été… sont autant d’exemples d’adaptations bioclimatiques.

L’essor moderne

Si le concept est ancien, le terme « bioclimatisme » est apparu plus récemment. Il a véritablement pris son essor dans les années 1970, suite aux chocs pétroliers qui ont mis en évidence la nécessité de réduire notre consommation énergétique.

Des pionniers

Des architectes comme Frank Lloyd Wright ont été des précurseurs en matière de construction solaire. Ils ont mis en avant l’importance de l’orientation des bâtiments, de l’utilisation des matériaux naturels et de la ventilation naturelle.

Le développement des technologies

Les progrès technologiques ont permis de mieux comprendre les phénomènes physiques liés au climat et de développer des outils de simulation thermique. Cela a favorisé l’émergence de nouvelles techniques de construction bioclimatique.

Les principes fondamentaux du bioclimatisme

Le bioclimatisme repose sur plusieurs principes clés :

  1. L’adaptation au climat local : chaque projet doit être conçu en fonction des conditions climatiques spécifiques du site. Cela nécessite des dispositifs adaptés, d’où sa proximité avec la démarche low-tech en architecture et en urbanisme.
  2. L’utilisation des ressources naturelles : il s’agit de tirer parti de l’énergie solaire, de la ventilation naturelle, de l’inertie thermique des matériaux, etc.
  3. La réduction des besoins énergétiques : l’objectif est de minimiser la consommation d’énergie en optimisant l’isolation, l’étanchéité à l’air et les apports solaires passifs, en minimisant le recours aux équipements de chauffage, de rafraîchissement ou d’éclairage artificiels.
  4. Le confort des occupants : une maison bioclimatique doit offrir un confort thermique et visuel optimal tout au long de l’année.

Les dépositaires de ce type d’architecture sont essentiellement des architectes, formés aux principes du bioclimatisme.

En somme, le bioclimatisme est une approche globale qui vise à construire des bâtiments sains, économes en énergie et en parfaite harmonie avec leur environnement.

Maison bois bioclimatique – LMB Martin Frères (FR-49)

Et vous allez voir que la maison passive s’inspire finalement beaucoup de ce concept, tout en y apportant une touche technologique discutable…

La maison passive ou Passivhaus

Passivhaus, terme allemand signifiant littéralement « maison passive », désigne une norme de construction qui vise à réduire drastiquement la consommation énergétique d’un bâtiment. Cette approche, bien qu’elle ait connu un essor important ces dernières années, trouve ses racines dans des recherches plus anciennes sur l’efficacité énergétique dans le bâtiment.

L’origine de Passivhaus : une révolution énergétique dans la construction

Les prémices : vers une construction plus sobre

Les premières réflexions sur la construction de bâtiments peu énergivores remontent à plusieurs décennies. Des architectes et des chercheurs ont exploré différentes voies pour optimiser l’isolation, la ventilation et l’étanchéité à l’air des bâtiments. Cependant, c’est dans les années 1980 que le concept de Passivhaus a véritablement commencé à prendre forme.

La naissance du concept Passivhaus

Des pionniers : les professeurs Bo Adamson de l’université de Lund (Suède) et Wolfgang Feist de l’IWU (Institut allemand pour le logement et l’environnement) sont considérés comme les pères fondateurs du concept Passivhaus. Ils ont formalisé cette approche en 1988, en définissant des critères précis pour atteindre une consommation énergétique extrêmement faible.

Les objectifs principaux d’une maison passive

L’objectif principal était de créer des bâtiments capables de maintenir une température intérieure confortable tout au long de l’année, sans avoir recours à un système de chauffage central traditionnel. L’accent a été mis sur l’isolation thermique, l’étanchéité à l’air, la ventilation mécanique contrôlée avec récupération de chaleur et les apports solaires passifs.

Le développement du concept

La certification Passivhaus : pour garantir la qualité et la performance des bâtiments construits selon ces principes, un système de certification a été mis en place. L’Institut Passivhaus, fondé par Wolfgang Feist en 1996, est chargé de délivrer cette certification.

La diffusion du concept : initialement développé en Allemagne, le concept Passivhaus s’est rapidement répandu dans d’autres pays européens et au-delà. De nombreux projets de construction ont vu le jour, démontrant la faisabilité et les avantages de cette approche.

L’évolution de la norme : la norme Passivhaus a évolué au fil des années, intégrant les avancées technologiques et les retours d’expérience des projets réalisés.

A savoir : en France, les dépositaires du passif se disputent la légitimité du concept. Plusieurs acteurs se revendiquent de la maison passive, mais ce principe ouvre la porte beaucoup plus aux constructeurs et maîtres d’œuvre que les principes du bioclimatisme.

Les principes fondamentaux de la construction Passivhaus

La construction Passivhaus repose sur cinq principes clés qui visent à créer des bâtiments extrêmement économes en énergie, tout en offrant un confort thermique optimal. Ces principes sont :

1. Une isolation thermique exceptionnelle

Une enveloppe performante

Les murs, le toit et le sol sont isolés de manière très performante pour minimiser les pertes de chaleur en hiver et les gains de chaleur en été.

immeuble ossature bois par Stéphane Cochet -Montreuil (Fr-93) conçu en mode passifDes matériaux isolants

Des matériaux isolants naturels ou synthétiques à haute performance sont utilisés, tels que la laine de roche, le polystyrène expansé ou la ouate de cellulose.

Des épaisseurs importantes

Les épaisseurs d’isolant sont généralement bien supérieures à celles requises par la réglementation thermique en vigueur.

2. Une étanchéité à l’air parfaite

Une enveloppe étanche

L’enveloppe du bâtiment doit être totalement étanche à l’air pour éviter les infiltrations d’air froid en hiver et d’air chaud en été.

Un test d’infiltrométrie

Un test d’infiltrométrie est réalisé pour vérifier l’étanchéité de l’enveloppe et localiser les éventuelles fuites d’air.

3. Une ventilation mécanique contrôlée avec récupération de chaleur (VMC double flux)

Le renouvellement d’air

Une VMC double flux assure un renouvellement constant de l’air intérieur, tout en récupérant la chaleur de l’air extrait pour préchauffer l’air neuf.

La qualité de l’air

La VMC permet de maintenir une qualité d’air intérieur optimale en éliminant les polluants et l’humidité … générés par des mauvais choix de matériaux ?

4. Des fenêtres performantes

Un vitrage isolant

Des fenêtres à triple vitrage sont généralement utilisées pour réduire les pertes de chaleur et les gains de chaleur.

Des menuiseries performantes  

Les huisseries des fenêtres doivent également être très étanches et isolantes pour éviter les ponts thermiques et diverses infiltrations.

5. Une orientation optimale et des protections solaires

Une orientation sud

Les ouvertures sont principalement orientées vers le sud pour profiter au maximum des apports solaires passifs en hiver.

Des protections solaires

Des protections solaires extérieures (stores, brise-soleil) sont installées pour limiter les surchauffes en été … générés par des grandes ouvertures.

En résumé, la construction Passivhaus repose sur une approche globale qui vise à minimiser les besoins énergétiques du bâtiment en optimisant son enveloppe, sa ventilation et son orientation pour une recherche de performance maximale avec des solutions techniques et parfois technologiques (comme la VMC double flux).

Habitat participatif Ecolodo conçu en mode passif - Verrières en Anjou- FR 49

Qui du passif ou du bioclimatisme impacte écologiquement le moins ?

Une démarche écologique vise à réduire notre impact sur l’environnement et à préserver les ressources naturelles.

Elle s’appuie sur plusieurs principes fondamentaux sur lesquels nous allons nous baser pour comparer les concepts de maison passive et d’architecture bioclimatique :

1. La réduction

L’objectif est de consommer moins en limitant l’achat d’objets inutiles et en privilégiant la qualité à la quantité. On cherche également à réduire les déchets en optimisant la gestion des déchets en privilégiant le compostage, le recyclage et la réduction à la source.

C’est aussi limiter sa consommation d’énergie en réduisant  sa consommation d’électricité, de gaz et d’eau en adoptant des gestes simples de sobriété au quotidien (éteindre les lumières, chauffer quand on est présent, etc.).

Le match de la Réduction :

L’objectif principal d’une passivhaus est bien de réduire, mais uniquement ses consommations d’énergie. Pour cela, on va utiliser une quantité de matériaux et des technologies, qui malheureusement impacteront plus lors de leur conception jusqu’à leur recyclage

Si la recherche de performance thermique n’est pas l’objectif numéro 1 d’une maison bioclimatique, le choix des matériaux (biosourcés et/ou recyclés) limite donc l’usage de ressources nécessaire à son efficacité.

🏆Victoire : égalité, avec un avantage sur le bioclimatisme

2. Le réemploi et le recyclage

Ici, on cherche à privilégier les produits d’occasion pour réduire la production de nouveaux biens. On trie pour séparer les différents types de déchets et faciliter leur recyclage. Enfin, donne une seconde vie aux objets en réparant, troquant, donnant ou vendant les objets dont on n’a plus besoin. Et quand on achète, on privilégie les produits fabriqués avec des matériaux recyclables et ayant une faible empreinte écologique.

Le match du Réemploi et du Recyclage :

Bien sûr qu’il est possible de chercher à utiliser des matériaux en réemploi ou à base de produits recyclés dans la construction d’une maison passive. Cependant, on va vite se heurter au problème de la certification des produits imposés par le label. Mais c’est possible en faisant le choix de bois d’oeuvre recyclé ou d’isolation à partir de matériaux recyclés (comme la ouate de cellulose ou la laine de coton).

Pour les maisons bioclimatiques, tout est possible dans le choix des matériaux, tant qu’ils sont sains pour la santé et performants pour le confort thermique.

A noter que le choix de matériaux ou solutions peu recyclables va aussi avoir un impact écologique lors de la déconstruction du bâtiment.

🏆Victoire : bioclimatisme

3. La réparabilité

C’est une notion qui tend à se développer avec les dernières normes : chaque solution adoptée doit pouvoir se réparer facilement, si ce n’est par soi-même, par un réparateur de proximité.

Le match de la Réparabilité :

Le choix des solutions utilisées pour isoler, étanchéifier et surtout ventiler une maison passive va se révéler déterminant. En effet, le choix de menuiseries, de solutions d’étanchéité ou de ventilation deviennent finalement problématiques lorsqu’il s’agit de les réparer voire même remplacer, quand il n’y a pas de solutions de réparation. En outre, à l’usage, une ventilation double flux demande un entretien régulier qui nécessite souvent le déplacement d’un technicien.

Dans le cadre d’une construction bioclimatique, le choix des matériaux et technologies étant plus souple, on peut plus facilement prendre en compte dès la conception les conditions de réparabilité, sans risquer de devoir faire appel à des experts extérieurs.

🏆Victoire : bioclimatisme

Maison bois et paille bioclimatique, Echopaille FR-44

4. Le respect de la biodiversité et de la santé

Pour protéger les espèces et leurs habitats, il est important de limiter l’utilisation de produits pétrochimiques ou contenant divers toxiques comme les COV.

Limiter son impact en consommant des produits locaux pour réduire l’empreinte carbone liée au transport des différents produits et des produits fabriqués dans des conditions respectueuses de l’environnement, des travailleurs et de ses occupants.

Le match du Respect de la Biodiversité :

C’est un point qu’on oublie souvent lorsqu’on programme son projet, d’autant plus d’une maison passive, même si cela tend à se clarifier. Or, nombre de matériaux, notamment dans les isolants, les finitions (sols, murs) sont loin d’être vertueux. Pourtant, ils auront à la fois un impact sur la biodiversité et la santé des occupants.

Dans un projet de maison bioclimatique, c’est un élément constitutif qui coule de source : tout doit être sain pour l’homme et l’environnement.

🏆Victoire : bioclimatisme

5. La mutualisation

C’est un point souvent négligé dans une conception de logement : mutualiser tout ce qui peut l’être pour réduire l’impact environnemental. Cela peut être le cas de pièces (salle commune, garage à vélo, lingerie, …), d’équipements (voitures, tondeuse, sèche linge, énergie, …). Il s’agit là de travailler à l’échelle d’un immeuble, d’un quartier ou d’un hameau pour partager ce qui est finalement peu utilisé ou trop coûteux à investir seul.

Le match de la Mutualisation :

Même si au niveau de la conception individuelle d’un logement, il paraît difficile de chercher à mutualiser, de plus en plus de concepteurs intègrent l’environnement proche pour optimiser tout ce qui peut l’être. C’est d’autant plus facile quand cela s’insère dans un projet collectif (type écolieu, hameau léger ou habitat participatif) et donc dans une conception souvent bioclimatique. Une construction passive, notamment en immeuble collectif pourra aussi intégrer cette recherche de mutualisation, si ses donneurs d’ordre en prennent compte !

🏆Victoire : égalité, avec un avantage sur le bioclimatisme

Alors, comme vous pouvez le voir, d’un point de vue écologique, le bioclimatisme l’emporte largement sur la maison passive. Le premier concept est basé sur l’interaction avec la nature, le 2e sur l’efficacité thermique à tout prix.

Il faut toutefois admettre que la maison passive apporte en matière de confort énergétique et d’économie d’énergie des qualités indéniables. Mais au coût de quels efforts financiers et de besoins en ressources ? Une question que vous devrez vous poser au moment du choix des solutions techniques et technologiques (plus low tech) lors de votre construction ! Or, si vous souhaitez que ces solutions restent locales, il faudra se renseigner sur leurs disponibilités, aussi bien en termes de ressources, de maintenance et de compétences.

En outre, de plus en plus contraints par la réglementation (RE2020) les concepteurs de maisons passives prennent en compte le bilan complet de l’analyse de cycle de vie. C’est-à-dire, toutes les étapes du cycle de vie du bâtiment, de la production des matériaux, leur mise en œuvre, son entretien jusqu’à la déconstruction et au recyclage. Reste encore à regarder de plus près l’impact environnemental et sanitaire de chacun des matériaux utilisés pour trouver le juste équilibre entre performance et écologie, et ainsi atteindre votre perfection !

 

Pour réaliser un projet qui correspond à vos aspirations, n’hésitez pas à venir l’exposer auprès des professionnels du réseau 🌳 Nature & Développement.
Ils sauront vous orienter vers les produits et solutions qui répondent à vos envies d’écologie.

Crédits Photo : JM Pupille – Agence d’architecture Voyelles, Build Green, Microsoft Designer

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